vendredi, janvier 11, 2008

On ne naît pas femme, on le devient

Je crois bien qu'une des particularités de la chaîne Arte est d'être en phase avec l'actualité. Non pas trop celle des tabloïds mais bien celle de la Culture. La Culture n'est pas figée dans le temps, ses acteurs sont de toutes les époques; il est donc tout à fait normal de souligner au passage les disparus qui ont marqué notre ère.

Il y a donc toute une programmation pour souligner l'anniversaire de la naissance de Simone de Beauvoir. Je m'apprête à regarder le Téléfilm d'Ilan Duran Cohen (France, 2006), Les amants du Flore.

Un amour indéfectible mais non exclusif, des passions intenses et d’ambitieux défis intellectuels : la marche vers le succès du couple légendaire Sartre et Beauvoir incarné avec brio par Lorànt Deutsch et Anna Mouglalis.

Paris dans les années 20. Simone de Beauvoir, jeune fille brillante et réservée, prépare l’agrégation de philosophie avec Jean-Paul Sartre, jeune homme fougueux aussi doué que rebelle aux valeurs établies. Celui-ci arrive premier au concours, suivi, à la deuxième place, par celle qu’il nomme affectueusement le Castor. Simone de Beauvoir devient ainsi la plus jeune agrégée de France. Les deux jeunes gens choisissent de lier leurs destins par un pacte d’amour en rupture avec les convenances bourgeoises : ils s’engagent à pouvoir vivre librement leurs "amours contingentes" (par opposition à leur "amour nécessaire") et à ne rien se cacher. Dans leur vie, le sexe et l’écriture se nourrissent mutuellement…


Pour son premier film de télévision, Ilan Duran Cohen, réussit le pari difficile de redonner chair et sang à ce couple mythique érigé en modèle de liberté, qui a influencé plusieurs générations. Retraçant de façon tendre et légère vingt années de leur vie amoureuse et intellectuelle, depuis la fin de leurs études en 1929 jusqu’à la publication en 1949 du Deuxième sexe, livre fondateur du féminisme, il dresse un portrait attachant des deux amants indéfectibles dont les choix existentiels apparaissent aux antipodes des conventions et des hypocrisies qui semblent redevenues la norme aujourd’hui.
Pour son premier rôle à la télévision, Anna Mouglalis incarne avec force une Simone de Beauvoir aussi touchante qu’impressionnante. Lorànt Deutsch, quant à lui, est souvent irrésistible en Jean-Paul Sartre partagé entre ses quêtes et ses conquêtes.

J'ai adoré me plonger dans la vie de ces intellos qui pour plusieurs nous ont marqués.

Ce que j'en retiens est le grand courage de Simone. Sa force brute pour s'insurger contre le système social d'alors. Sa grande intelligence qui l'a menée à l'agrégation, à l'enseignement et à l'écriture.

On la qualifie de mère du féministe... pour certains c'est péjoratif, pour d'autres honteux et d'autres encore à fuir... Quand on sait qu'en 2007: la tendance est de se dire NON-féministe... on voit que plusieurs n'ont rien compris et que l'autre majorité bien pensante a tout faux.

Ce que Simone de Beauvoir a tenté de vivre fut une totale liberté, à tout le moins égale à celle des hommes. Les aléas de la société, de la nature humaine, du coeur... ont fait qu'à mon avis elle y a plus ou moins réussi. Parce qu'elle aussi fut bernée par un homme. On change les mots, les termes et les circonstances et puis l'homme fait encore ce qu'il veut.

Moi je dis qu'au niveau de la collaboration intellectuelle et de l'amitié indéfectible: Sarte fut un as. Pour le reste... il fut un homme totalement ordinaire, qui plus est: porté par de Beauvoir!

Simone elle; fut précurseure du féminisme oui, elle a surtout traduit en mots, la teneur de cet idéal à revendiquer. Pour le reste; elle fut comme bien d'autres... une femme blessée, une femme qui ayant trouvé le grand amour dû le laisser filer à cause de sa grande popularité soudaine!

C'est quand même un monde non???

Mais bon; ce qui est encore plus désastreux, à mon avis; c'est de constater le net recul, ou bien le non-avancement de la condition féminine. C'est hallucinant!!!

Est-on tous vraiment au 21e siècle???

15 commentaires:

Anonyme a dit…

Intéressant merci!
Le féminisme du 20e était un mouvement de pionnières, nécessaire, très nécessaire. Les mentalités ont changé et on peut se demander pourquoi on rétrograde ainsi.

Ma question : voulons-nous vraiment la liberté? Les structures sont perfectibles mais elles sont en place, c'est dans nos têtes que cela se passe.

Être libre c'est d'abord trouver en soi-même la raison, les moyens, le bonheur de vivre, condition pour un partage dans l'égalité.

Être libre en tant que femme c'est renoncer au pouvoir que me donne le maternage d'un homme : le nourrir, laver son linge et son environnement. Renoncer à l'idée infantilisante qu'il ne sait pas, renoncer à "faire à sa place"... au risque de le perdre s'il cherche une maman.

Au boulot exiger un salaire juste ou partir, renoncer à faire le café pour ses messieurs ou débarrasser les tasses sales, même s'ils ne le font pas. Prendre sa place.

Avec ses enfants, se donner les moyens de moyens de garde de qualité et cesser de croire que seule la Mama peut tout, sait tout.

L'égalité c'est maintenant dans la tête des femmes qu'elle doit se construire... pour autant que nous le voulions vraiment.

Le voulons-nous? Pas sûr !

AK47 a dit…

Salut Béo,

Je pense que notre société occidentale et orientale vient de loin...

Si tu regardes tout l'effort accompli en l'espace d'un siècle (suffragettes...), je pense que nous pouvons tous être fiers du travail même si la parité femme / homme est loin d'être acquise...

Je me rends compte qu'il y'a un quart de siècle, il aurait été impensable d'avoir son chef hiérarchique qui soit une femme et aujourd'hui cela est monnaie courante.

Maintenant il est sur qu'il reste encore beaucoup de combats à mener et à gagner comme avoir beaucoup plus de CEO femmes (Meg Whitman...), améliorez le sort des femmes dans les pays déshérités mais Rome ne s'est pas construit en un jour ...

Continuons ensemble à faire progresser les choses, le jeu en vaut la chandelle car c'est juste l'avenir de notre humanité qui se fera Ensemble ...

A.

PS : Je vais essaye de trouver le 2ème sexe (trop pleutre pour le lire jusqu'à récemment)

Beo a dit…

Sugus * C'est très complexe en fait et tellement différent d'un pays à l'autre.

Au sein du couple, il est primordial que la relation n'en soit pas une de maternage, sinon à quoi bon...

Au boulot, il suffirait que TOUTES les femmes refusent un salaire plus bas à qualités égales.

Moi quand j'ai réalisé que c'était "normal" et entendu que ça n'avait aucune importance que la femme gagne moins... tant que c'est pas elle qui fait vivre la famille: les cheveux m'en dressent encore sur la tête d'entendre pareilles inepties!

Pour ce qui est des enfants... un jour peut-être... je dis bien peut-être... la société helvétique saura donner les moyens et les choix réels aux mères. Pour l'heure on est loin du compte!

Si on résume: une femme gagne obligatoirement moins que l'homme, par contre elle doit sur son salaire prendre en compte les frais de garde, assumer son boulot, l'horaire des écoles, la tenue de la maison etc. Dans ces conditions on est loin de la liberté, pour moi c'est de l'esclavage pur et simple.

La vrai liberté des femmes commence quand son entourage-hommes, société-, est vraiment de son côté.

Sinon, ça revient à nager perpétuellement à contre-courant pour finir noyées.

Beo a dit…

ak47 * C'est clair qu'il y a eu des avancées importantes, sauf qu'il y a des régressions tout aussi importantes. C'est jamais totalement gagné :(

Un quart de siècle équivaut bien à 25 ans hein? C'est exactement le bond en arrière que j'ai vécu en mettant le pied en Europe...

Autrement, j'y suis venue seule. Mes enfants je les ai élevés au Québec, je n'ai donc pas eu les contraintes d'ici. Dieu merci!

Pour connaître les deux côtés de la médaille soit: la société égalitaire au plan humain du Canada, et celle d'ici; j'avais le choix de casser la baraque :), ou de me fondre gentiment dans la masse.

N'empêche qu'il y a certaines choses qui choquent totalement mes collègues. Que j'aie ma voiture, que j'aie mon compte en banque à moi, que je puisse discuter avec des hommes sans avoir d'arrières pensées...

AK47 a dit…

Béo,

Hé... tu habites au Soudan ? :D

C'est terrifiant ce que tu me dis...

Je suis dans ma trentaine et les filles que je connais ici en Angleterre et là bas en France qui sont dans le début de la trentaine ou trentaines assumées et s'assumant complètement, gèrent leurs vies comme un projet gigantesque avec projection sur 30 ans.

Exemple concret, une de mes potes est enceinte depuis 2 mois, elle a jetée son ancien gars avec qui elle sortait depuis 15 ans (amour de jeunesse) car le gars refusait de devenir père.

Elle s'est mise avec un gars beaucoup plus jeune, plus en phase avec ses aspirations perso et pro et hop un Enfant après 6 mois de relation.

La majorité des femmes que je connais dans les 2 pays, sont dans ce modèle.

Après peut-être que j'ai des œillères et encore trop de femmes et d'hommes sont encore dans ce modèle patriarcale ou la femme est cantonnée à un rôle de bobonne, ce qui me fait flipper soudainement...

Oui, 1/4 = 25.

Je vais sortir, je flippes sec ...

A.

Anonyme a dit…

Putin comment ça se fait que je n'ai as encore lu "le deuxieme sexe" ?!!

Beo a dit…

Ak47 * Le sujet est trop sérieux pour faire des blagues faciles ;)

Je viens d'avoir 50 ans et je viens d'un pays où l'égalité des sexes est réelle, non pas parfait mais bien réel.

Je me réjouis que des femmes comme tes amies puissent agir ainsi. Ce devrait être le cas pour tous, sans se sentir coupable. On a qu'une vie.

On a le choix -ou pas justement-, d'en faire ce dont on a le plus envie.

Je trouve inadmissible que des parents, un mari ou même une société, décide ou dirrige carrément la vie d'une personne. La femme est bien une personne hein!

Sinon: je crois bien qu'en France les femmes ont une longueur d'avance sur les suissesses. Triste constat s'il en est...

Beo a dit…

Geneviève * Je dirais que jusqu'ici...t'en as pas vraiment eu besoin? He he!

Je ne sais plus si c'est aujourd'hui ou si c'était hier soir... il y a une émission prévue sur RDI, avec une entrevue exclusive faite avec Mme de Beauvoir.Tirée des archives évidemment :)

Anonyme a dit…

J'aurais beaucoup voulu voir ce reportage. Moi, je n'ai pas peur de dire que je suis une féministe convaincue, parce que le sexisme existe toujours et encore. Il n'y avait qu'à regarder ce qui s'est passé avec Ségolène Royale. Lui, on critiquait ses idée, et elle, on critiquait sa façon de s'habiller ou de se coiffer! Franchement!

Je sais que la société a beaucoup avancé, mais je vois encore trop de femmes qui portent la burka ou qui vivent dans des conditions désastreuses dans des pays comme l'Arabie Saoudite, et j'entends encore trop de commentaires déplacés et de blagues sexistes sur les femmes.

C'est vrai, j'ai le choix aujourd'hui de coucher avec qui je veux, de me marier ou non, d'avoir un job et pas d'enfants, mais les commentaires désobligeants sont toujours présents, le sexisme toujours apparent dans le language (moins au Canada, c'est sûr), et je suis convaincue qu'il reste encore beaucoup à faire pour que les choses changent en profondeur et non pas seulement à la surface.

Merci Béo pour ce post!

Beo a dit…

Dr. Caso * C'est moi qui te remercie pour ce commentaire parce que je trouve important et intéressant d'avoir l'avis d'une personne ayant vécu sur les 2 continents.

C'est hélas vrai que parfois ça demeure en surface, même au Canada. Il n'en demeure pas moins que partout -ou presque- dans le Monde. La volonté au départ doit venir de la personne.

Je viens de lire que les femmes-girafe commencent à se libérer du joug de cette pratique horrible. Pourquoi? Parce que maintenant, en plus de cette tradition dénaturante, elles sont utilisées strictement à des fins touristiques!!!

AK47 a dit…

Béo,

J'avoue que la blague sur le Soudan était facile et déplacée. Désolé :os

D'un autre coté, ton témoignage sur la Suisse me terrifie...

Le pays est si en retard que cela au niveau de la parité femme - homme ?

A.

Beo a dit…

Ak47 * En fait, ma remarque visait plus ce qui me venait en réponse à ton commentaire. Surtout que dans chaque pays, il y a des zones d'ombre.

Il n'y a pas eu 40 Benazir Butho...parce que c'est rarissime d'avoir les privilèges qu'elle a eu de la part de sa famille. Ce qui a donné un diamant parmis ce peuple opprimé. Bref; je m'égare :)

Pour la Suisse, je dirais que c'est dans les moeurs qu'il y a encore tant à faire et la lenteur administrative n'aide pas vraiment.

Il est bien vu d'avoir eu une femme présidente de la Confédération en 2007, sauf que cette fonction n'a aucun pouvoir décisionnel... comme le soulignait judicieusement Dr.Caso... il se trouve encore tout plein de gens pour faire mention de la tenue vestimentaire de nos parlementaires féminines plutôt que d'entendre leur discours :(

Sinon: pour les horaires d'écoles enfantine; rien de mieux pour reléguer la dame à ses fourneaux qu'elle n'a à peu près pas le temps de quitter durant la semaine et on ne parlera pas des places de crèches.

Beo a dit…

Pour les intéressés: sur RDI ce dimanche à 22 heures, le reportage sur l'entrevue exclusive avec Simone de Beauvoir.

AK47 a dit…

Salut Béo,

Je suis d'accord qu'il reste énormément de routes à parcourir.

La bonne nouvelle est qu'on y va.

A.

Beo a dit…

Ak47 * Exactement et l'autre bonne chose est qu'on souligne avec fierté le travail accompli par des femmes comme Madame de Beauvoir.

Bon dimanche!