mercredi, juin 11, 2008

La tradition des métiers de bouche

À force de préparer des billets à l'avance, je m'embrouille, vous l'aurez compris: le 4e volet c'est ici!

Un souper de cérémonie au Château, 1897
400 ans de gastronomie à Québec


La ville de Québec compte moins de 2000 habitants à la fin du XVIIe siècle et on dénombre alors 20 aubergistes. En 1755, Québec a moins de 8000 habitants dont 80 aubergistes, les trois quarts originaires de France. Tous ces Français, irrités par les guerres franco-britanniques, les représailles religieuses envers les protestants ou un peu plus tard par la Révolution française quittent la France pour l’Angleterre, les États-Unis ou Québec et Montréal.

Certains de ces immigrants cuisiniers s’installent à Québec parce que, dit un célèbre auteur français du XVIIIe siècle, «les gens de qualité ne vont pas au cabaret, ils vont manger chez le traiteur.» Effectivement, les services de traiteur sont fort recherchés par les gens plus fortunés de la colonie. Tant qu’aux citadins, ils se procurent des mets préparés par les pâtissiers ou les boulangers.

À cette époque, la France compte de nombreuses corporations comme celle des charcutiers, les bouchers, les boulangers, des limonadiers, des cafetiers, des confiseurs. Chacune comporte ses privilèges et donne droit d’offrir des services exclusifs. Les traiteurs français (à l’origine de la profession de restaurateur) jouissent des droits de trois professions : ceux du pâtissier, du cabaretier et du rôtisseur. Ils peuvent donc organiser les noces ou les festins, tant chez lui qu’à l’extérieur.

La lutte pour les privilèges ne se déroule pas seulement entre les métiers, mais à l’intérieur de cha­que corporation, la maîtrise ne s’ob­tient qu’après un apprentissage qui peut durer de trois ans à cinq ans. Au Canada, cette ségrégation entre corporation n’existe pas. Si l’apprentissage existe, il n’a pas toute la rigueur française. La colonie compte beaucoup moins de métiers de bouche qu’en France au XVIIIe siècle.

Pour revenir à la profession de traiteur, on constate qu’une majorité d’entre eux après avoir travaillé pour les gouverneurs, les évêques ou notables de la colonie, se recyclent pour leur propre compte. Vers 1750, il est de bon goût de se rendre chez le traiteur Alexandre Picard, anciennement chef cuisinier de l’officier Bourlamarque, d’aller chez Jacques Lemoine autrefois chef de cuisine au Séminaire de Québec, ou bien chez Jean Amiot qui arrivait des cuisines du gouverneur La Galissonnnière.

Nous pouvons même constater que la cuisine mène à tout, même à la politique. Celui qui semble être le plus connu de ces traiteurs est un certain Menut, cuisinier des gouverneurs Murray puis Carleton. Il devint député. Politicien, Menut cesse la cuisine, il vend même l’un de ses commerces à un ex-cuisinier du gouverneur Clark, Charles-René Langlois, qui devint le premier restaurateur canadien au sens moderne du terme.


Jean Soulard

Le Soleil

Collaboration spéciale

Québec



Voir le 3e volet

2 commentaires:

Danaée a dit…

Moi qui revient me promener sur mes blogs, je vois ton beau projet de billets sur notre 400e.

J'ai assisté récemment à une conférence de Jean Soulard, justement sur l'histoire et la bouffe à Québec. C'était passionnant. Il est très sympa comme personne, en plus, même s'il fait à manger aux grands de ce monde!

Beo a dit…

Danaée * C'est l'impression qu'il me donne pour l'avoir vu en entrevue.

Il est sympa et ne se prends pas pour un autre. Tu es bien chanceuse de l'avoir entendu(et vu)en vrai!